samedi 25 octobre 2014

Et si on prenait le train ?

A l’heure où je vous écris j’ai un fils dans un TGV quelque part en France. Et comme le rapport de la Cour des Comptes sur le TGV est très négatif c’est peut-être le moment de parler de ce sujet.

Je ne rentrerai pas dans les détails du rapport de la Cour (pdf complet ici et article de presse sérieux et résumé là) mais on va parler de quelques aspects grand public. Car la SNCF choisira sa propre stratégie. Elle étudie d’ailleurs une hausse des tarifs pour les plus riches (1° classe), comme si cela pouvait remplacer des réformes structurelles…! Etudie-t-elle une hausse du prix que les agents SNCF et leurs ayant-droit doivent payer (entre 0 et 10% du prix public) ?

Le TGV n’est pas rentable. Ce fleuron de la technologie française voit son taux de rentabilité décroître année après année. Pas assez de voyageurs et malgré les tarifs élevés, les coûts d’exploitation sont trop importants. Il faut dire que le surcoût TGV par rapport à un train normal est trop élevé, et surtout par rapport aux autres modes de transport qui se sont maintenant développés : les autocars longue distance, le covoiturage organisé ou les vols low cost. Même les modèles idTGV ou avec réservation très longtemps à l’avance ne sont plus trop adaptés car les voyages sont de plus en plus courts et de plus en plus organisés au dernier moment. Le fait d’avoir adopté le modèle de réservation de l’aérien est peut-être finalement un handicap.

Le TGV s’arrête partout dans plein de gares. Chaque petite ville veut « sa gare TGV » pour faire croire qu’elle va se développer. Je lisais par exemple qu’il y a plus de gares desservies entre Quimper et Brest par le TGV que par un train TER normal… On voit bien là le poids des politiques locaux. Il y a eu un mythe du tout TGV qui allait accompagner le développement de toutes les zones touchées et a contrario condamner les zones tenues à l’écart. En fait ça ne marche pas comme ça. Une zone économique en avance ou en retard le restera avec ou sans le TGV.

L’époque est à la crise. Et la crise se calcule en économies que les clients doivent/veulent faire. Si le coût du transport est trop élevé, alors on ne se déplace pas ou on choisit un autre mode, y compris la voiture (partagée ou non) car elle reste rentable assez rapidement en fonction de la distance, du nombre de voyageurs et de l’accessibilité du lieu où l’on va. Les TGV moins chers sont encore très chers. Il semble d’ailleurs que la clientèle des TGV soit avant tout celle des classes aisées. Moins de professionnels, toujours pressés. Moins de classes défavorisées. C’est un paradoxe par rapport à la « vision » initiale qui a présidé à ce mode innovant de transport.

Il y a l’argument écolo évidemment qui milite pour le train sous toutes ses formes. Mais cet argument en a pris un coup pour deux raisons : quand les taux de remplissage sont insuffisants, la pollution reste la même et augmente donc par tête de pipe ; la construction des LGV - les lignes à grande vitesse - coûtent de plus en plus cher et sont de plus en plus polluantes et dommageables pour l’environnement, y compris en empreinte carbone. Dans beaucoup de régions la construction de ces lignes pose des problèmes environnementaux qui sont de plus en plus bloquants. Et un TGV sur une ligne classique ne sert à rien. Il pollue même plus qu’un train normal du fait de la puissance électrique nécessaire. Les conducteurs de TGV le savent bien, puisque même à pleine vitesse et sur une ligne rapide, ils coupent le courant dans les descentes pour économiser sur la facture d’électricité. C’est même à cela qu’on reconnait un bon conducteur…

Enfin, il y a la modernité de la SNCF. L’effet TGV a focalisé toutes les énergies, car c’est un gros projet. Sur des tas d’autres chantiers, il y a du retard : de la maintenance pas faite faute de moyens (sauf sur les portions de lignes classiques empruntées par les TGV) ; des innovations non mises en oeuvre car pas assez de capacité disponible pour investir : à ce titre la caricature réelle s’est passée il y a peu de temps : la ministre du numérique a demandé sur Twitter pourquoi il n’y avait pas du wifi à bord des trains (quitte à faire payer un extra) et la SNCF a botté en touche. Pourtant, du fait de son réseau physique, la SNCF a longtemps été la première entreprise à disposer d’un réseau de télécoms très bien distribué dans toute la France, sous-loué même à certaines autres compagnies de temps en temps. Ce temps est révolu et la SNCF est maintenant en retard sur ces innovation. Et ce n’est pas en mettant des lunettes Google aux contrôleurs sur les quais des idTGV que l’image va s’améliorer ;)

Le train, c’est bien pourtant. Et à l’heure de l’ouverture à la concurrence, il est temps de proposer des solutions à cette baisse de rentabilité, car ce n’est pas l’Etat-pauvre qui va renflouer un éventuel déficit !

Photo de famille, un TGV peut en cacher un autre

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire