jeudi 1 octobre 2015

Un Proche-Orient de plus en plus loin

La notion de Proche-Orient n'existe qu'en français et qu'en France. Le Moyen-Orient est plus utilisé un peu partout. Cette distinction traduit l'attitude "spéciale" de la France dans la région depuis un siècle et l'époque des protectorats, à laquelle la France a lourdement participé. Le Proche-Orient englobe les pays qui touchent la Méditerranée ou presque, notamment Israël, la Palestine, le Liban et la Syrie.

Un sac de noeuds depuis longtemps qui déclenche toutes les passions, qui clive toutes les positions et qui jette la zizanie dans nombre de clans. Il n'y a pas de vérité dans ce domaine, et je n'en détiens surtout aucune. Personne ne sera satisfait de ce billet. Chacun a ses opinions en la matière, comme des ornières creusées par des milliers de carrioles brinquebalant sur des routes détrempées par le sang des malheureux qui sont morts dans ces conflits interminables.

La région a longtemps été l'excuse pour tous les extrémismes. On a souvent dit que le conflit israélo-palestinien était à l'origine des tensions dans la région. Ca a été vrai, notamment lors de plusieurs guerres ou intifadas, mais l'opposition politique entre Etats s'est étendue à d'autres pays, y compris à l'EI maintenant, tandis que l'opposition religieuse musulmans-juifs s'est également déplacée vers des tensions internes à chacune de ces religions, par exemple avec l'opposition chiites-sunnites.

Beaucoup d'analystes, vrais ou faux experts, essayent de nous prouver qu'ils détiennent la vérité et qu'ils sont donc légitimes pour proposer des solutions, de type y'a qu'à ou faux cons. Lire par exemple ici un point de vue israélien et ici un point de vue plus pro-palestinien. Il est en tous cas vrai que les lignes ont bougé entre tous les acteurs présents dans la région, et on peut en dire quelques mots, quelles que soient les causes réelles ou supposées de ces mouvements :

Le drapeau de la Palestine a été hissé pour la première fois hier à l'ONU avec les 193 autres drapeaux des Etats membres. La Palestine n'est - comme le Vatican - qu'un Etat observateur mais l'Assemblée générale des Nations Unies (unies ? vraiment ?) venait de voter le droit pour ces deux pays observateurs de hisser leur drapeau. Une grande première, très symbolique et qui a été célébrée comme il se doit par tous ceux qui croient à la reconnaissance de l'indépendance de cet Etat.


Le n°1 palestinien, M. Abbas, a tenu un discours très diplomatique mais cependant offensif à la tribune des Nations-Unies. Il a évoqué la fin des accords d'Oslo sans le dire nettement, histoire de redonner du grain à moudre à ses partisans et au peuple palestinien de Cisjordanie, puisqu'à Gaza ce sont les islamistes du Hamas qui gèrent ce territoire et qui ne reconnaissent aucune autre autorité. Ce discours était attendu et certains parlaient même d'une "bombe". Cela aurait été le cas s'il avait clairement dénoncé les accords d'Oslo mais il n'a pas franchi le pas, semble-t-il découragé par les grandes puissances.

Ca me fait penser à une blague, très macho, mais pas fausse dans sa première partie : Vous connaissez la différence entre un diplomate et une femme ? Un diplomate qui dit oui, ça veut dire peut-être ; un diplomate qui dit peut-être, ça veut dire non ; et un diplomate qui dit non, ça n'est pas un diplomate honorable. Une femme qui dit non, ça veut dire peut-être ; une femme qui dit peut-être, ça veut dire oui ; et une femme qui dit oui, ça n'est pas une femme honorable. Abbas est un vrai diplomate.

Car les occidentaux, et même les russes et les chinois, ont fort à faire avec la situation dans les autres pays de la région, évidemment avec l'Etat Islamique qui n'en est pas un mais qui cherche à fédérer toutes les forces du coin dans un califat universaliste. Ils ne souhaitent pas allumer de contre-feux en ravivant un conflit israélo-palestinien un peu oublié, au détriment des populations concernées et à l'avantage de ceux qui souhaitent consolider leurs positions, même en lousdé. Cyniquement, certains officiels palestiniens ont dit qu'il n'y avait pas assez de morts dans leur Etat par rapport à la situation en Syrie et dans l'Ouest de l'Irak, ou même par rapport aux victimes des attentats terroristes dans le monde. Les politiciens sont cyniques mais c'est leur métier.

Les israéliens sont eux toujours tranquilles en apparence (à l'extérieur) sur le sujet et concentrent leurs colères sur l'Iran et sa capacité nucléaire militaire. Il est vrai qu'ils ont intérêt à minimiser le problème palestinien, tant que ça tient, dans le jeu complexe des alliances politiques en interne dans cet Etat mosaïque. Les USA les soutiennent toujours à fond, tandis que la France reste fidèle à son ni-ni et vote un coup avec les USA et un coup avec les russes. Ca a été le cas pour le drapeau palestinien ou les frappes aériennes en Syrie : la position de la France est difficile à comprendre et encore plus à expliquer.

Ce qu'on peut noter, c'est que l'importance moindre prise par le conflit entre Israël et Palestine dans la région aura forcément des conséquences lourdes sur toute la région. L'Histoire montre que ces périodes sont souvent suivies d'éclats et de conflits exacerbés. Ce n'est pas parce que la poudrière est en feu quelques centaines de kilomètres au nord que la situation ne peut pas vite se dégrader à quelques kilomètres de l'Egypte. Alors, ayons une pensée émue pour toutes celles et tous ceux qui sont coincés dans ces conflits puissants et lourds. Parce que, au final, ce sont bien les peuples qui comptent. Pas leurs dirigeants.

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