samedi 12 mars 2016

Go-eau-Gueules

Et si on revenait un peu sur cette semaine chargée ?

Go d’abord. J’en ai parlé ici mercredi dernier. Aujourd’hui samedi, tôt ce matin, une partie de l’Humanité a basculé dans une nouvelle ère, n’ayons pas peur de le dire. AlphaGo a gagné son troisième match et mène donc 3 à 0 sur une partie en cinq matchs. Les deux derniers sont attendus dimanche et mardi, mais il ne peut plus perdre... Lee Sedol, l’humain, champion du monde de Go quand même, pensait gagner 5-0 ou 4-1 au pire. Maintenant, s’il perd 1-4 et non 0-5 ce sera un exploit...  Lisez les commentaires de joueurs professionnels ici, sur ce site de gourous du Go.
Alors qu’il y a encore une semaine, personne ne croyait voir de telles victoires de l’IA, on peut lire aujourd’hui sur ce site des phrases du genre "AlphaGo made history once again on Saturday, as the first computer program to defeat a top professional Go player in an even match. In the third of five games with Lee Sedol 9p, AlphaGo won so convincingly as to remove all doubt about its strength from the minds of experienced players. In fact, it played so well that it was almost scary ».
Cet article conclut par « We as a community of Go players will have to adapt and make the most of to this new force in the world of Go, and perhaps it’s time for broader discussion about how human society will adapt to this emerging technology ». On parle bien d’un saut dialectique. Il ne s’agit pas seulement d’un exploit technologique. Le Go était considéré depuis longtemps comme l’Everest des jeux de stratégie pour un ordinateur : impossible à gravir. Maintenant que la montagne est vaincue, le monde a changé :
- le jeu de Go ne sera jamais plus pareil, car les coups de AlphaGo ont été jugés comme novateurs, créatifs et brillants, spécialement dans l’ouverture que tous les joueurs s’accordent à dire le plus difficile des moments. Les échecs sont passés par là. Les prochains champions devront savoir aussi essayer de battre de telles machines, y compris en adaptant leurs stratégies.
- Google, à l’origine du rachat de la société qui a conçu AlphaGo, va maintenant s’attaquer à d’autres jeux exigeant des stratégies différentes. On parle par exemple de Starcraft avec un jeu massivement multi-joueurs (humains) et la difficulté de se mettre à les battre alors qu’ils sont par nature imprévisibles. A la recherche d’autres Everest.
- Google va aussi instiller des morceaux d’IA (intelligence artificielle, même si cette expression est ridicule) dans pleins de produits, des plus grand public aux plus professionnels (médecine notamment).
- L’autre conclusion oppose les machines à la fois aux génies humains et aux êtres normaux que nous sommes (en tous cas moi, sans offense).  Un génie comme Einstein ou Mozart a une durée de vie limitée. Quand il meurt ou arrête de créer, ses créations inspirent de nombreux humains pour très longtemps, mais lui, il arrête de créer. Alors qu’un programme informatique n’oublie pas. Il évolue tout le temps et apprend en permanence. Il peut être cloné un très très grand nombre de fois, sans perte. Comme des petits génies spécialisés. Spécialisés, vraiment ? Hum hum... Imaginez simplement des machines allant puiser leurs informations pour apprendre et pour assimiler les clones déjà existant dans une grosse base de données stockées sur de gigantesques serveurs (chez Google évidemment). Pas besoin de grande puissance alors. Juste de bonnes liaisons Internet... Sympa, non ?

Sur le Go, si vous ne connaissez pas le jeu, allez ici pour un manuel interactif d’initiation et gratuit très bien fait et essayez de jouer des parties sur un « goban » réduit, par exemple de 9x9 au lieu de 19x19 (un quart). Version française là.

Mise à jour dimanche matin : Lee Sedol a gagné le quatrième match. AlphaGo a visiblement perdu les pédales lors d'une bataille au centre vers le coup 79. Les experts ne savaient pas sur le moment si c'était un coup profond ou raté. Gageons que AlphaGo deviendra meilleur. Gageons aussi que c'est comme cela que les programmeurs apprennent. Et les pros du Go aussi !

Sic transit gloria mundi.... fluctuat ? Nec mergitur

Dans un autre domaine, plus mergitur, cette semaine était la première de l’exercice inédit de simulation de crue de la Seine à Paris. Une semaine pour que l’eau atteignent son maximum et déborde (voir la carte ci-dessous), avec son pic ce week-end : murage de station de métros, exercices de sauvetage.... Une semaine (la prochaine) pour la décrue et pour constater et réparer les dégâts (chiffrés en dizaines de milliards). L’opération a son site officiel ici.


En regardant ce genre de carte, certains se diront, c’est bon je suis protégé... Vaste illusion. Car au-delà des mètres d’eau à certains endroits, c’est bien l’ensemble de la région et de la France qui seront touchés dans un certain nombre de domaines cruciaux : réseaux eau et électricité détruits, transports impossibles, entreprises et sous-traitants fermés, chaîne alimentaire défaillante... Une vraie crise majeure pour laquelle cet exercice de simulation est une grands première (même au plan mondial). Article à lire ici pour en savoir plus sur les problèmes de coordination des différents métiers et sur les situations de crise majeure.

Alors, après le démarrage des manifestations contre la loi Travail, autre grande actualité de la semaine, il est important de se poser des questions marginales comme celles-là, du Go à l’eau de la Seine, sans oublier l’ogre Google. Tout cela nous éloigne du quotidien difficile des exclus du monde du travail, oui, mais cela doit nous faire réfléchir au monde en construction... et surtout à la place que chacun veut y occuper, en particulier les jeunes.





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