jeudi 14 février 2013

Croissance ?

Depuis hier on parle des chiffres de la croissance en France et par comparaison en Allemagne évidemment. Ca évoque deux commentaires différents autour de cette "croissance nulle en 2012".

Sur le fond, le dernier trimestre 2012 a en fait annulé la (faible) croissance du début de l'année. Une jolie infographie ici (du Figaro, on ne se refuse rien). On y distingue une poursuite de la baisse de 2011 en début d'année 2012, un rebond au 3° trimestre (à partir de juillet donc) et une baisse plus forte à partir de l'automne. Cette baisse de l'automne a frappé partout, et encore plus fort en Allemagne qu'en France. L'Allemagne étant plus haute au départ a pu préserver une faible croissance (0,7%), très faible pour l'Allemagne plutôt habituée à des 3 ou 4%. La France était plus basse depuis des années et donc cette baisse nous ramène à zéro. Le gouvernement tablait sur un +0,3%. Il va donc devoir revoir sa copie sur les dépenses et surtout les recettes en 2013. Le Premier Ministre a d'ailleurs déjà annoncé que l'objectif de déficit pour 2013 serait "impossible à tenir et légèrement dépassé". Exit le 3%, bonjour le 3,3% ? On verra. Peu de gens sont surpris.

Sur la forme, c'est beaucoup plus rigolo.

L'ensemble des élites et des médias ont décidé depuis des années de ne jamais utiliser de mots négatifs en matière d'économie. Il s'agit d'un consensus général, systématique destiné à ne pas réveiller d'anciens démons ou à ne pas affoler les populations, qui ne comprennent pas toujours tout à la quantité de chiffres, de statistiques et de tableaux déversés sur nous par des médias, pas toujours très avertis non plus, d'ailleurs.

Les mots utilisés sont donc toujours positifs. La réalité non. Pour simplifier, la réalité peut être positive, nulle ou négative. Elle peut aussi accélérer ou freiner, avancer, reculer ou stagner. Elle peut aller très vite, très lentement, etc. Les spécialistes et les médias ont donc décidé d'utiliser des noms positifs accompagnés d'adjectifs ou d'adverbes positifs, négatifs ou nuls. Les adjectifs ont moins de poids que les noms.

Parenthèse : Ne dites pas à un enfant "Ne touche pas à la prise électrique" car il retiendra les mots "prise électrique" et pas vraiment le "ne...pas". Dites plutôt "Attention, ça brûle". Fin de la parenthèse.

Une croissance nulle ? Pourquoi pas une décroissance nulle ? Une stagnation ? Un plateau ? Un équilibre ?
J'aime particulièrement l'expression croissance négative (ce qui est le cas par exemple du dernier trimestre). Vous vous imaginez planter des choux et attendre leur croissance négative pour les manger ? Vous espérez combattre la croissance négative de vos revenus avec une décroissance négative  de vos impôts ou plutôt une croissance nulle de vos avantages négatifs ?

Il est clair que l'embrouillamini créé par ces mots entremêlés vise à paralyser les capacités de réflexion des populations. Quelques économistes, plus doués, courageux et pédagogues que les autres réussissent de temps en temps à dépasser ce phénomène. En ce moment il y en a peu, pour ne pas dire que leur nombre est en croissance négative.

Sur ce, bon courage et bonne lecture des journaux !


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