mercredi 19 mars 2014

Corruptions

Tiens, un petit article intéressant à lire et qui nous avait échappé. C'est ici, sur Novethic. On y parle de la corruption dans le milieu des grandes entreprises et des marchés publics. La Commission européenne s'alarme de ce phénomène qui fait perdre de l'argent à tout le monde (sauf aux corrompus). C'est un phénomène européen, mais la France "peut mieux faire" comme on dit en termes diplomatiques.

Le rapport de la Commission européenne sur la France (en pdf) est instructif (il date de début février). Je ne résiste pas au plaisir de vous en citer un petit extrait : "La petite corruption ne semble pas problématique en France. À l’inverse, la politique française est la cible d'allégations de corruption et de népotisme, qui viseraient même des hommes politiques de haut rang et des agents publics. Les autorités françaises ont reconnu l'existence de problèmes sous-jacents et ont défini les mesures à prendre pour remédier à ce que le gouvernement avait qualifié de «crise de confiance». Bien que la France ait récemment légiféré sur les conflits d’intérêts, elle ne s'est pas attaquée aux risques liés à la corruption dans le secteur des marchés publics et dans les transactions commerciales internationales. Par ailleurs, le financement des partis reste une matière dans laquelle des améliorations législatives pourraient contribuer à l’intégrité".

Vous remarquerez que la corruption "politique" et la "crise de confiance" occupent une belle place dans ces conclusions ! Par opposition à la "petite corruption", la "grande" est beaucoup plus problématique : elle alourdit les charges des entreprises et des collectivités publiques, de la commune à l'Etat, et elle fait sortir du circuit des impôts et taxes des montants importants qui pourraient être utilement injectés dans l'économie, et elle sape la confiance dans les décideurs. Si le sujet vous intéresse, il y a également le site de "Transparency International France", en français.

La France adore donner des leçons au monde. Sur le sujet de la corruption, elle n'est pas crédible. François l'a bien compris en voulant redonner une transparence à la vie politique et en en faisant un de ses chevaux de bataille. Cette politique est totalement sous-estimée en France, car tout le monde croit que cela ne nous concerne pas ou que c'est "normal" (à ne pas confondre avec un président normal ;) donc inévitable. A l'international, dans les milieux économiques et diplomatiques, c'est au contraire une politique reconnue, car finalement elle augmente la crédibilité et la fiabilité de la France.

Les affaires Sarkozy (en cours d'enquête ou devant la justice) feront peut-être prendre conscience aux français que c'est aussi un sujet important chez nous, à ne pas traiter à la légère. Mediapart a lancé ce matin un pavé dans la mare en publiant des textes, censés être extraits des conversations entre Sarkozy et son avocat. Si ces textes s'avéraient exacts, et seule la justice (heureusement de plus en plus indépendante) le dira, il s'agirait alors d'un exemple concret de corrupteurs pris la main dans le sac. C'est une petite affaire évidemment : il n'y a pas mort d'homme et pas de fortunes planquées ici ou là. Mais placée au plus haut niveau de l'Etat et entre avocats ayant prêté serment, c'est un symbole. Même en Italie il y a eu des opérations "mains propres" et des condamnations (Berlusconi par exemple).

Evidemment, il faut s'attendre à toute une batterie de réactions : des cris d'orfraie, des dénonciations de chasse à l'homme, des procédures pour porter plainte, des détournements d'attention. Pourquoi pas, la preuve que tout ceci est faux, d'ailleurs. A quelques jours d'élections municipales très importantes pour la vie locale et quotidienne de la plupart des français, rappelons-nous que les dirigeants sont avant tout des personnalités, en qui nous espérons pouvoir avoir confiance, au moins sur ces plans là. Les petits arrangements banals entre amis ne doivent pas nous faire faire des amalgames du genre "tous pourris". Ils doivent nous éclairer sur la distance entre les discours et les actes. Prendre un peu de recul pour observer les responsables politiques et les candidats ne peut que nous redonner le goût de la politique et de son importance.

Comme l'écrit très bien Racine dans Polyeucte, acte I, scène 1 (et comme l'ont si bien dit des générations de grands acteurs avec l'intonation bien placée) :
"Et le désir s'accroît quand l'effet se recule".


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