mercredi 15 juillet 2015

La lente mort de Flash le dinosaure

En informatique, les morts peuvent être soudaines ou lentes. Je parle bien d'informatique ici.

Il arrive qu'un produit (logiciel ou matériel ou service ou réseau ou...) meure du jour au lendemain pour de multiples raisons : un procès ou une saisie pour activité illégale souvent liée au piratage ou à la contrefaçon ; une cessation d'activité pour rentrées d'argent insuffisantes ; la décision brutale d'un dirigeant ; le rachat par un groupe plus grand qui va soit l'intégrer dans l'un de ses produits, soit le tuer pour éviter une con curante jugée dangereuse... De temps en temps, ces produits renaissent sous forme "libre" ou "open source" ou "open content". Mais c'est la loi dans le monde numérique. Une loi dictée par un "écosystème" brutal et sauvage dans lequel Darwin est omnipotent, car seuls les plus puissants survivent.

Mais il arrive aussi que des produits mettent de nombreuses années à mourir, parce que les habitudes des utilisateurs sont trop fortes autour de ce produit, parce que les développeurs en dépendent et préfèrent garder de vieux systèmes que les transformer vers quelque chose de plus moderne et fiable, ou parce que le créateur du produit en vit encore et refuse de se séparer d'un marché juteux et d'une vache à lait digital. L'histoire de l'informatique est pleine de ces trucs qui nous encombrent :

- on connait l'histoire du clavier AZERTY ou QWERTY pour les anglophones, qui a été copié à partir des machines à écrire conçues au départ pour que les barres métalliques ne s'emmêlent pas les pinceaux. Ìl était question à l'époque de ralentir le rythme de la frappe et de répartir les barres de manière à éviter des touches trop proches à taper presque ensemble et il y avait trop d'utilisateurs (de secrétaires) pour oser changer de système, malgré la création depuis de claviers plus efficaces.

- on connait l'histoire de Windows qui est encore le système le plus largement utilisé sur les PC et qui accumule des générations et des générations de compatibilité avec des demandes anciennes - antédiluviennes même si on compare l'arrivée d'Internet à un déluge, au risque avéré de se fragiliser.

Parlons un peu de Flash, le produit phare d'Adobe. Lorsque Adobe s'est lancé dans le "grand public" c'est par Flash qu'il y est arrivé. Pour les professionnels, le business d'Adobe est florissant autour de très beaux produits pour illustrateurs, photographes, designers de toutes sortes, mais tout a changé avec la généralisation de Flash pour la plupart des applications en ligne à une époque. Cela touchait les jeux (les petits jeux en ligne mais aussi certains gros paresseux), les vidéos et autres contenus multimédias, les applications en ligne interactives et même des sites internet entiers car les outils de conception d'Adobe étaient pratiques à utiliser : quick and dirty.

Depuis plusieurs années, Flash est en perte de vitesse un peu partout. Apple et Steve Jobs avaient été les premiers à refuser Flash sur les appareils iPhone, iPod et iPad, en 2010. A l'époque les autres avaient rigolé et les critiques avaient été nombreuses : encore une lubie d'Apple. La raison invoquée était simple pourtant : fiabilité quasi nulle notamment pour des piratages ; grosse consommation de ressources matérielles et énergétiques, forcément rares sur des terminaux plus légers ; existence d'une solution de remplacement, standard et normée - le HTML5 - qui permettait déjà de gérer pratiquement les mêmes choses et qui a dépassé Flash aujourd'hui. Quand on lisait la presse à l'époque, c'était Apple le vilain petit canard, presque. Les geeks ont la mémoire courte (mais les cheveux longs).

Aujourd'hui Flash est réellement en train de mourir. Même les acteurs du libre, comme ils se nomment eux-mêmes, ont décidé de lâcher Flash au profit du HTML5 et de technologies incluses directement dans les navigateurs sans avoir besoin de module supplémentaire à ajouter. Flash ne s'installe plus automatiquement et il faut le faire à la main (si on le veut vraiment). Les versions bogues et avec failles de sécurité sont interdites immédiatement. Flash est clairement devenu trop lourd et trop inefficace pour tout le monde, y compris Adobe.

Quelques grands pontes du libre réclament même pour la première fois à Adobe l'annonce d'une date officielle de fin du support de Flash. Cette annonce obligerait en effet les développeurs et concepteurs de jeux et de sites qui utilisent encore Flash à changer de technologie au risque de ne plus être visibles sur l'Internet.

Adobe n'a encore rien dit. Comme les allumeurs de réverbères qui ont disparu au XIX° siècle avec la Fée Electricité, ils attendent certainement le dernier moment possible, histoire d'engranger le maximum de dollars et de gêner le maximum d'utilisateurs. Mine de rien il reste encore des quantités phénoménales de lieux sur l'Internet qui ont besoin de Flash.

Moi j'ai décidé de ne plus utiliser les sites et jeux Flash - tant pis pour eux et pour moi. Puisque c'est à la mode, on attend tous le FLEXIT !

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