jeudi 17 septembre 2015

Le pays des hommes désintégrés

Burkina Faso, le pays des hommes intègres. En crise depuis plus d'une année.
On en a parlé ici, ici et surtout là et . J'y étais en mai dernier.

Les élections devaient avoir lieu le 11 octobre, après une année de transition démocratique "modèle" : L'ex-président Compaoré avait été éjecté du pouvoir par la première révolution populaire en Afrique et avait dû fuir le pays. Un pouvoir de transition avait été mis en place, dans un consensus général, en exceptant le parti de l'ancien président. Tout se préparait pour ces élections. Pour mémoire, Compaoré, Blaise, avait voulu pouvoir se représenter en modifiant la Constitution à son avantage, et c'est ça qui avait déclenché la révolution.

Patatras, hier, la "garde présidentielle" (RSP), en partie fidèle à l'ancien président, et qui devait être dissoute prochainement, a pris en otage le Président du régime de transition et son premier ministre en plein conseil. Puis ce matin, un ancien bras droit de Blaise a annoncé qu'il prenait le pouvoir, car la préparation des élections se passait mal. C'est un coup d'Etat, un vrai. Pas une révolution populaire comme l'année dernière.

Les coups d'Etat africains sont légion - si j'ose dire - et peuvent être dûs à plusieurs causes : des batailles entre factions militaires (typiquement l'armée, la police, la garde présidentielle ou des milices privées), des revendications de certains corps armés (en général salariales), des ambitions d'un militaire qui veut faire comme les grands ancêtres et prouver qu'il a un plus gros zizi que les autres, ou la volonté de garder le pouvoir ou d'y retourner malgré la Constitution. Au Burkina, il s'agit clairement d'une tentative de retour de Blaise et de ses fidèles (son parti), écartés du futur pouvoir.

La communauté internationale est vent debout contre ce coup d'Etat, comme à chaque fois au début. Elle ne reconnait pas la déchéance du Président officiel de la République burkinabé.

Cette affaire peut mal tourner dans un pays fier, et fier de sa révolution unique en Afrique. Une réaction populaire est attendue, avec un point d'interrogation sur l'attitude de l'armée. Ce n'est pas le moment d'aller au Burkina. On va voir comment Canal+ et iTélé vont traiter le sujet, car depuis qu'ils sont sous le contrôle direct de Bolloré, leur indépendance éditoriale est bien limitée. Le Grand journal est devenu atone et le Petit journal de plus en plus petit. Il faut savoir que Bolloré est l'un des hommes d'affaires les plus influents en Afrique francophone, un des rois de l'Afrique. Son projet de chemin de fer traversant toute l'Afrique de l'Ouest est à ce titre exemplaire. Il doit passer par Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso.

Ceux intéressés par l'Afrique suivront avec attention la situation de ce petit pays, notamment sur ce site d'information burkinabé. Les autres devraient se souvenir qu'une révolution populaire est fragile. Très fragile. Même en France.

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